J’avais 14 ans, nous étions quelques-uns à fréquenter un ciné-club actif, ouvert, peu onéreux et diffusant une véritable envie de cinéma …
De ce cinéma qui est bien autre chose qu’un simple divertissement
convivial …
De ce cinéma qui sait enchanter la vie, qui s’adresse à tous, véritable ferment de culture
populaire …
Ce soir-là, on présentait Lola de Jacques Demy, cinquante ans ont passé mais je
m’en
souviens encore et du blanc et du noir et de Nantes et du mouvement lent de la
7ème
symphonie rythmant la rencontre des personnages …
Pour ceux qui ont le bouquet cinéma de Canalsatellite ou le
bouquet OCS, le mois de novembre a été l’occasion de voir ou revoir un
grand nombre des films de ce réalisateur : Lola, La Baie des Anges, Les Parapluies de
Cherbourg, Les Demoiselles de Rochefort, Le joueur de flûte, Lady Oscar, Une Chambre
en Ville …
Voir ou revoir les films de Jacques Demy c’est une chance, son univers
nous enchante et il faut prendre le verbe dans son sens littéral.
Agnès Varda, son épouse a réalisé peu avant la disparition de
son compagnon « Jacquot
de Nantes »,
un documentaire où elle retrace le parcours de
ce fils de garagiste s’enfermant dans un grenier pour réaliser ses premières animations alors que son
père lui
demande de passer un CAP de chaudronnier.
Ce qui me touche particulièrement chez ce réalisateur, c’est qu’il n’a jamais oublié, malgré les
paillettes faciles qu’offre le 7ème art, malgré Hollywood, ses origines ouvrières.
Comme dirait Rimbaud, Jacques Demy c’est « une main à charrue » ce qui
vaut bien « la
main à plume ».
On le voit particulièrement dans un de ses premiers films : « Le sabotier du Val de
Loire » où la caméra nous montre patiemment le
travail de l’artisan
sabotier réalisant
à la main ce sabot que portaient nos ancêtres paysans.
On le voit aussi dans ses choix de sujets et de ses thèmes. Il met en scène au moins deux contes
populaires : Peau d’âne , le Joueur de flûte ; les préoccupations de ses
personnages rejoignent celles des humbles ; Une chambre en ville - que je tiens
pour une de ses réalisations la mieux aboutie, même si le succès, n’a pas vraiment été au
rendez-vous, part des manifestations ouvrières des chantiers navals à Nantes
en 1955.
Enfin pour moi ce cinéma chanté se rattache directement à l’ambition du théâtre de Bertolt Brecht et ils
ne sont pas si nombreux ces artistes qui
construisent une véritable culture populaire s’adressant à tous.
FOREST Jean Michel.
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